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LE GRAND-EST À L'AUBE D'UN PLAN D'ÉRADICATION DE LA BVD

Le prélèvement de cartilage permet de détecter les veaux infectés permanents immunotolérants (IPI). Fourni par l'établissement départemental d'élevage (EDE), le kit comporte une boucle auriculaire, qui se pose à l'aide de la pince d'identification, et le nécessaire pour envoyer l'échantillon au laboratoire. PHOTOS © C.R.

Les groupements de défense sanitaire (GDS) du Grand-Est ont défini un plan d'actions collectives afin d'éradiquer la BVD. Basé sur le dépistage par prélèvement auriculaire à la naissance et l'élimination des bovins réservoirs du virus, il doit débuter en 2016.

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LE VIRUS DE LA DIARRHÉE VIRALE BOVINE OU MALADIE DES MUQUEUSES (BVD-MD) engendre des pertes économiques en élevage, en causant de l'immunodépression, de la mortalité néonatale et des troubles de la reproduction. L'école vétérinaire de Nantes (Loire-Atlantique) a estimé, en 2004, qu'en élevage laitier infecté, le préjudice se situe entre 46 et 83 € par bovin et par an. L'estimation britannique réalisée la même année conclut à 56 € par bovin et par an. La Suisse, sur sa population totale et sans prendre en compte les frais vétérinaires, de diagnostic et les pertes génétiques, a quant à elle chiffré un coût annuel de 4 à 8 € par bovin. Des actions sont donc menées contre la BVD, dans différents pays d'Europe. La Suisse arrive au terme de son programme collectif national d'éradication de la BVD commencé en 2008. L'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et l'Irlande, ont débuté les leurs.

UNE POSITION FRONTALIÈRE DÉCISIVE

En France, un groupe de travail national est lancé. Les GDS d'Alsace, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Lorraine, et d'une partie de la Bourgogne, rassemblés en zone Grand-Est, ont suivi avec attention la mise en ordre de marche de leurs voisins européens. Car la moitié des dix-sept départements du Grand-Est sont frontaliers.

« La Suisse a mis les moyens et montré que c'est techniquementpossible. Le fait que d'autres pays s'y soient ensuite lancés prouve que c'est rentable financièrement, considère Vincent Potaufeux, directeur du GDS des Vosges et animateur du plan collectif BVD Grand-Est. Avec ainsi 50 % de ses bordures en plan, le Grand-Est ne peut aujourd'hui écarter le risque de voir arriver des bovins infectés permanents immunotolérants (IPI) de ces zones... ». De quoi conforter les dix-sept GDS dans leur décision, prise en 2012, d'élaborer leur programme collectif BVD.

Jusque-là, la BVD, maladie non réglementée (car sans danger pour l'homme), était gérée par chaque GDS au travers de plans individuels d'assainissement (PIA) dans les élevages atteints par la maladie. « En 2003, après dix ansde cette gestion, nous avons comparé nos méthodes et résultats entre départements du Grand-Est. Conclusion : mener des PIA les uns à côté des autres, avec une position frontalière, ne permettrait pas de nous en sortir : le virus circule à nouveau dans 50 % des élevages quelques années après un PIA ! », relate Vincent Potaufeux.

IPI À L'ORIGINE DES CONTAMINATIONS

Ce fut là le point de départ de la réflexion collective. Aujourd'hui, le plan Grand-Est est validé techniquement et se trouve en phase de préparation concernant son budget et sa stratégie de mise en oeuvre. Inspiré des modèles suisse et allemand, il repose sur un principe fondamental d'éradication des IPI. Ces animaux sont porteurs à vie du virus car ils ont été contaminés in utero entre le quarantième et le cent vingt-cinquième jour de gestation. Or, la présence d'un IPI au sein du troupeau représente un risque majeur de contamination par la BVD. « Les IPI ne représentent en moyenne que 1 à 2 % des naissances. Mais ils sont à l'origine de plus de 95 % de la transmission du virus, intra et interélevage ! chiffre l'animateur. Il s'agit de bombes à virus. C'est pourquoi nous misons sur leur éradication précoce. »

Par un plan de dépistage systématique et obligatoire des IPI dès la naissance des veaux, ainsi qu'un contrôle des mouvements sur une zone donnée, les GDS comptent « éradiquer la BVD en quatre ans ».

Quatre campagnes de bouclage généralisé, phase la plus coûteuse, doivent offrir la garantie de l'absence de virus. La stratégie consistera ensuite à surveiller que la BVD ne circule pas à nouveau, par des analyses sur le lait et par des sérologies.

Les GDS du Grand-Est comptent commencer leur action collective en Alsace, Lorraine et Franche-Comté courant 2016. Puis l'étendre à la Champagne-Ardenne en 2018, afin d'arriver à quinze départements engagés à moyen terme.

LE GRAND-EST POSE 80 % DES BOUCLES BVD

Déjà, les principes de ce plan collectif sont en oeuvre ponctuellement dans les départements, au sein d'élevages volontaires qui pratiquent le dépistage systématique et prennent des mesures de prévention (lire témoignage ci-contre).

« Actuellement, 80 % des boucles BVD posées en France le sont dans le Grand-Est, estime l'animateur. Dans le Doubs et en Moselle notamment, plus de la moitié des veaux qui naissent sont testés. » La généralisation du plan à partir de 2016 fait passer à une tout autre échelle l'organisation et les budgets. Sur toute la zone Grand-Est, pas moins d'un million de veaux par an devront être testés, projette le GDS

Et l'animateur chiffre le coût du plan entre 8 à10 € par veau testé, tout compris (analyses, élimination des IPI, administratif...), mais hors vaccination. « Nous recherchons actuellement des financements pour diminuer les coûts et négocions les tarifs des boucles et analyses ».

Des boucles qui, d'ici à l'an prochain, pourraient enfin être homologuées dans une version mixte permettant de prélever et d'identifier.

CATHERINE REGNARD

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